Marche…ou brève n°6

Nuit plutôt bizarre à la pension Serenita, une nuit pas comme les autres.
Dans les albergues, les pèlerins (moyenne d’âge 60ans) dinent à 18h30 et se douchent à 20h, extinction des lumières et ça dort. Mais ici c’est ambiance 25-30 ans, le sac, les chaussures, tout pareil…mais je ne les ai jamais vus sur le chemin. La douche à 20h00 idem mais personne ne rejoint son lit. Comme pour le chemin, je ne sais où ils sont partis. Les lits se sont agités plus tard (ou tôt) dans la nuit.

Départ de Coimbra à 8h00 depuis la cathédrale Sé, direction porte Amedina (clin d’œil au passé arabe du pays : medina, la ville !), l’église Santiago.

La cathédrale Sé

Place du commerce les puciers s’installent. La ville n’est pas encore tout à fait réveillée. La sortie de la ville est facile.

A quelques centaines de moi deux pèlerins marchent d’un bon pas.

Je me mets en tête que ce sont des Français, j’accélère, je les rattrape. Ce sont deux Australiens (un père et sa fille) et me voici parti en anglais. Le père est content que je sois là : je ralentis la marche forcée de sa fille.

Le chemin n’est pas agréable sur ce tronçon : on marche le long d’une route goudronnée. Au bout de 2h30 et 10km de route, pause syndicale au café de Trouxemil. Après les habituels 2 cafés, sandwich jambon et gâteau on file. Comme dit le père australien en montrant sa fille : « quand le chef se lève, on est reparti ! »

Traversée de plusieurs petits villages où beaucoup de maisons sont abandonnées ; les oranges dans les jardins pas ramassées mais les chapelles sont encore bien entretenues.

On dépasse le village de Mealhada et on s’arrête à l’auberge de Sernadelo.
6h50 de marche et 26km : ce sera suffisant pour la journée.
Le repas du soir sera pris en commun : 2 Australiens, 2 Belges, 1 Croate, 1 Anglais et moi. Un improbable échantillon de la planète Terre.

J’aurais aimé goûter la spécialité du coin : le cochon de lait à la broche de Bairrada. Mais ce ne fut pas possible : il faut être 4 à en commander pour que le cuisinier le prépare et je n’ai pas réussi à fédérer.

14 avril. Départ de Sernadelo 7h30. Pas de petit-déjeuner à l’albergue et beaucoup de commerces fermés : c’est dimanche.
Traversée d’une forêt d’eucalyptus. C’est un régal de s’arrêter de marcher et d’écouter le silence. Ce matin j’ai repris ma marche solitaire : c’est moins rapide mais plus libre ; arrêt photo, arrêt silence, arrêt tout court, pause syndicale et petit café…

Arrêt pour le petit-déjeuner au village d’Aguim qui prépare le dimanche des Rameaux. La chapelle est ouverte, propre, fleurie et les rues du village sont couvertes de rameaux jusqu’à la chapelle.

Là encore plein de vieilles maisons abandonnées : quelle tristesse ! Une maison abandonnée c’est la fin d’un projet, d’un amour, d’une vie…

Au village de Borao au contraire les édifices et les habitations sont pimpants.

Le pays est connu pour sa production vinicole (AOC). Le Chemin passe devant la propriété Rota do Vinho da Bairrada. C’est fermé : on fera la dégustation ce soir.

Águeda : terminus. 7h40 de marche et 27km de plus dans l’escarcelle !

Albergue Antonio : accueil superbe, l’hospitalière est adorable et le cadre fantastique.

Le repas commandé est un régal (brandade de morue) pris avec presque les mêmes marcheurs que la veille, arrosé du vin du pays +++ très bon !

Santé !

Étape 18 : déjà le 15 avril. Très bonne nuit bien calme. Lever au point du jour, réveillé par le chant du coq : c’est super agréable.

Petit-déjeuner à l’albergue. Il est urgent d’attendre car il pleut des cordes « raining cats and dogs » disent les Anglais. A 11h00, il faut prendre une décision : je ne vais quand même pas encore rester au bistrot. Housse sur le sac, poncho sur le pèlerin et je pars, sous la pluie, le long d’une route nationale. Ça ne vous fait pas rêver : moi non plus !

Le pas s’accélère, on baisse la tête, on ne voit rien, donc pas d’arrêt photo ni autres prétextes pour faire un stop. Le record de vitesse est battu : 11km en 2h00 !

Traversée de Pedacaes, puis enfin chemin en forêt, puis de nouveau le long d’une nationale, toujours sous la pluie.

Pause syndicale à Serem, repas dans un bistrot et une demi-heure plus tard c’est reparti.
Traversé une forêt d’eucalyptus, des ornières et des flaques partout, de quoi regretter de ne pas avoir pris maillot de bain, palmes, masque et tuba.
Ce qu’il y a de bien, avec un temps comme ça, c’est que les « Coquillarts » ne sont pas de sortie. Les Jacquets qui portent leurs coquilles ne risquent pas d’être attaqués au coin du bois. Ils peuvent marcher tranquilles.

Encore faut il ne pas perdre son chemin et bien suivre la signalétique européenne. Le jaune en direction de St Jacques est le symbole du chemin.
Encore un petit effort, et ça y est. Arrivée à l’albergue de Albergaria a Nova
(5h30 – 23km)
J’ai ouï dire que dans certaines albergues l’hospitalier te passait la main dans le dos pour voir si tu arrivais bien à pieds et si tu transpirais. Ce soir, il aurait pu le faire : le dos et même le bas du dos était trempés. Pour le slip mouillé, ne me dites pas que c’était des fuites…c’était des infiltrations !
Pour la lessive c’était pratique : le pèlerin habillé direct sous la douche. J’ai vendu le procédé à mes amis australiens sous le terme « lessive à la portugaise ».

§§§§

Quelle tristesse ce soir de voir Notre Dame en feu : dire qu’elle venait de fêter ses 856 ans. La télé a tourné en boucle toute la nuit sur l’incendie jusqu’à ce que soit annoncé que le feu était sous contrôle.

ND de Paris en flamme (crédit photo La Croix)

Ici, dans cette région les incendies sont monnaie courante. Il y a beaucoup de grandes forêts. Deux essences d’arbres y sont particulièrement représentées : les eucalyptus et les pins maritimes, matières premières de l’industrie papetière.
Tous ces incendies ont suscité de nombreuses vocations de pompiers. Et quand il y a un incendie quelque part, le cœur d’un bombeiro bat la chamade.

La suite le 19 avril.

2 thoughts on “Marche…ou brève n°6

  1. Toujours autant d’humour mon cher capitaine. C’est dommage que la pluie soit toujours de la partie. Bon courage et au plaisir de te lire au prochain épisode.

  2. Savais-tu, jacquet monzami, que le bourdon (13000kg) qui occupe la tour Nord de ND de Paris, date du XVeme s. et que Louis 14 en 1686 le fit fondre. Il en fut le parrain et lui donna le nom de…Emmanuel….Réflexions multiples.
    C’est vraiment agaçant cette pluie portugaise. Expliquer : pourquoi le silence dans les forêts d’eucalyptus ? Et en marchant, pense t-on à des petits coupe-faim ?
    Donc tu n’es pas encore passé par Fatima…
    Courage courage les kilomètres s’additionnent. Bises
    Lyne

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