Brèves

Traditions ou modernité ?

A quelques encablures à pied du port se trouve Marjane. Non point une belle fille d’ici comme son nom semble l’indiquer mais l’enseigne d’un supermarché.

Comme en France on y trouve toutes sortes de denrées et matériels mais il y a quelques différences notables que je ne peux passer sous silence.

Au rayon fruits et légumes on trouve diverses graines en vente au détail : lentilles corail ou vertes, pois chiches blonds, haricots rouges, blancs ou noirs, sésame, fèves … il y en a pour tous les goûts !

Plus loin les pates alimentaires, coquillettes ou tortillons… puis les fruits secs : dattes, figues, pruneaux, abricots…et, un peu à l’écart, les olives (entières, dénoyautées, concassées, vertes ou noires, au piment ou à l’huile…), les cornichons, les variantes et les citrons confits… Mais on longe aussi, exposés en pyramide, des monceaux d’épices moulues et d’herbes aromatiques qui attirent le regard et embaument, exposant leurs belles couleurs chaudes autant que leurs arômes puissants. Cumin, curcuma, gingembre, cannelle, ras el hanout, lavande, thym, sarriette… sont aussi en libre service et donnent au supermarché un parfum local.

Mais ce savant étalage ne remplacera jamais l’ambiance des souks : là on a un authentique air d’Orient ! Là les légumes secs et les épices, moulues ou non, sont présentés dans de grands sacs en papier kraft, aux bords soigneusement roulottés, d’où le vendeur tire une pelle en plastique ou en fer blanc pour servir son client. Il peut même à la demande vous composer un mélange d’épices qu’il va moudre, auréolé de poussière odorante, dans un antique moulin dont le moteur crépite, et vous servir dans un sachet. Là les figues sèches sont enfilées sur un lien de raphia et vendues « au mètre » en quelque sorte même si elles atterrissent en fait sur la balance. Là la viande n’est pas présentée en barquette de polystyrène : les poulets sont encore sur pieds souvent !

On a oublié chez nous cette vente au détail des denrées alimentaires, même si certains magasins y reviennent aujourd’hui, notamment dans les boutiques bio ou les magasins discount : n’acheter que la quantité requise est tendance mais peu courant encore. Il est sans doute dommage d’avoir perdu au nom de normes d’hygiène ou de règlements (sans doute nécessaires mais tatillons jusqu’à l’extrême) le contact avec la marchandise ou surtout, avec le marchand !

Pour en finir sur ce chapitre il faut que je raconte une autre chose insolite pour nous, occidentaux, chez Marjane. Au mois de novembre dernier avait lieu l’Aïd en Kebir, la plus grande fête de l’Islam. À cette occasion, comparable par son effervescence joyeuse à la période des fêtes de fin d’années chez nous, le supermarché a fait des grandes promotions commerciales et organisé un tirage au sort. En jeu des voitures, des appareils ménagers, des TV à écran plat, et… 500 moutons à gagner !

Nous avons participé à la tombola mais je me suis demandée ce que nous ferions si d’aventure nous gagnions un mouton : au ponton l’herbe est rase !