Marche…ou brève n°5

Étape 11 : Rabaçal – Conimbriga – Cernache. Déjà 247km au compteur en ce 10 avril. Le moral est très bon, le corps s’habitue doucement à l’exercice et le sac est supportable. Le plus dur c’est peut-être la pluie (assez présente en début de semaine)… Mais tant de rencontres sympathiques.

Hier soir fromage local, très bon et repas typique. On ne meurt pas de faim au Portugal, c’est bien connu.

Départ de Rabaçal 8h00 après petit-déjeuner à l’albergue.

Tout de suite dans l’ambiance « camino » paisible, en pleine campagne.
Il fait frais mais il ne pleut pas. Au bout de 2 heures un Portugais m’arrête et me donne mon poncho ! Je ne sais pas d’où il arrivait mais il m’avait doublé sans que je le vois. J’ai retrouvé mon poncho sans l’avoir perdu.

Toujours pas de St Jacques. Je le traque dans sa version XIIIème siècle en vieillard barbu et majestueux, un livre à la main comme à St Sernin à Toulouse ou en martyr décapité, le glaive à côté comme à Chartres ou à Notre-Dame de Paris.
Dans sa version XIVème en pèlerin le bourdon d’une main, le livre dans l’autre (comme à Puente la Raina) ou sa version hybride du XVIème mi-apôtre mi-pèlerin (comme au musée des Augustins à Toulouse).
Dans sa version après XVIème en pèlerin accompli avec pèlerine, chapeau à bord relevé, coquille, besace et bourdon.
Même dans la version matamore de 850, le tueur de Maures sur son cheval blanc donnant du courage aux Templiers pour la Reconquista…

Et le voilà enfin, St Jacques ! Un panneau en azulejos à son effigie en pèlerin.

Mon GPS me confirmait bien que j’étais sur son chemin mais je commençais à en douter !

Les boîtes aux lettres des maisons sont amusantes (plein de modèles différents). Vu l’église de Fonte Corbeta et passé un pont du XVème.


De nouveau traversée de la campagne puis arrivée à Conimbriga où je visite les ruines de la ville romaine et le musée.

A force de suivre la voie romaine on ne peut que traverser des villes romaines. Celle-ci est très bien conservée suivant un urbanisme typiquement romain du 1er siècle avant JC : plusieurs villas, bains, mosaïques, murailles…

Le musée romain est intéressant aussi.

Le chemin continue mais je me fourvoie et prends celui du trail régional. Ça monte et monte encore, 300m de dénivelé et au bout de 2 heures, épuisé et réalisant mon erreur je rebrousse chemin. Je me perds et pars au travers des fourrés en entendant le bruit de la circulation routière. Oups ! A la sortie du dernier bosquet je me retrouve sur la route au milieu de filles attendant dans leur voiture…Mais j’étais sauvé. J’ai suivi la route en direction de Cernache. 8h30 de marche pour 26km.

Seul à l’auberge : ça fait bizarre car la maison est froide, humide et dormir au milieu de 25 lits vides…
Bref il est temps de prendre la douche et dormir.

§§§§

Jeudi 11 avril. Coimbra prochain arrêt.

A 8h00 je tire la porte de l’albergue avec l’idée de prendre un café 50m plus loin dans le plus vieux bar de la ville, le très célèbre bar Hortense. La patronne y sert à toute heure un verre de lait…

Pas de chance, le bar est fermé. Bon Camino, je continue mon chemin.
100m plus loin session de rattrapage : la boulangerie est ouverte, j’y entre et qui j’y retrouve ? … Niels qui s’en va.
J’y prends mon petit dej : 2 cafés au lait, un sandwich jambon, un bolo, un pastel… tout ça pour 4€ et c’est parti .
Au lieu-dit Jantesta, une petite église est ouverte, j’y entre. Deux femmes sont en grand recueillement et là dans un moment de calme absolu, mon téléphone annonce d’une voix sépulcrale digne d’un baryton « 2 heures vous avez fait 4,15km ». Totalement pris au dépourvu et très gêné ne sachant quoi expliquer, l’ambiance étant ruinée, je suis parti, piteux.


Le chemin est détrempé avec de nombreuses flaques et encore une fois je me suis perdu. Pour me remettre sur la voie au plus court je traverse un champ puis un jardin au bout du champ. J’aperçois le chemin derrière le muret de clôture, mais devant le muret, une niche. Je passe en mode furtif…mais un cabot qui devait dormir d’un œil sort d’un bond de chez lui. Qui a dit qu’après 60 ans on n’était pas rapide ? Je fais un bond aussi, plus rapide que le sien, passant le muret de justesse.

Le problème c’est que derrière, il y avait un caniveau et là patatras je fais un roulé-boulé et me voilà sur le sac pattes en l’air. Le chien lui pose ses pattes avant sur le muret, ricanant de ses belles dents blanches. Je me relève : rien de cassé, le pantalon pas déchiré mais sort de la maison la patronne furieuse à qui je dis un « Bon Dia » tonitruant, demandant aussi sec où est le chemin de St Jacques de Compostela. « C’est pas ici, c’est en Espagne ». Impossible de m’en sortir.
Je reformule ma question : « Où est le chemin pour Coimbra ? »
Elle veut que je prenne la «camioneta », m’amène à l’arrêt de bus et me donne en pièces jaune 1,35€. Je refuse, lui montrant que j’ai de la monnaie. Elle retourne vers sa maison et moi je continue mon chemin. Plus de peur que de mal.

Du haut de la colline en arrivant sur Coimbra on a une très belle vue.

Vue de Coimbra

A mi-colline en descendant, un petit bistrot où une halte s’impose après toutes ces émotions. Et devinez qui est dans le bistrot ? … Niels

Arrivée à Coimbra après 3h30 de marche et 12km.

Ce soir nuit à l’albergue du couvent de Santa Clara a Velha (bâtiment du XIIIème sans chauffage) et repas avec 4 Calabrais de Sylla.

§§§§

Pause touristique en ce 12 avril. Pérégrinations à Coimbra. Suivez le pèlerin St Jacques version nain de jardin et nez rouge. Drôle mais pas flatteur !

8h00 Petit déjeuner au bistrot à côté : de quoi tenir le rythme !

et c’est parti, sac au dos, car le règlement de l’albergue n’autorise pas un pèlerin à rester 2 nuits.
Visite du couvent de Santa Clara-a-Nova (XVIIème) impressionnant par sa longueur, un monument notoire de l’architecture baroque portugaise.

Traversée du Rio Mondego (non, pas à la nage) : il suffit de passer le pont et là on est au pied de la vieille ville.

Je voulais faire repos aujourd’hui mais ça commence par une bonne grimpette pour aller rejoindre Se Velha la cathédrale du XIIème.

A l’intérieur une statue de ND du Rosaire, de superbes azulejos et un beau cloître. C’est une des rares églises de la Reconquista, ce mouvement de reconquête du XIème au XVIème siècles par le monde chrétien de la péninsule ibérique et des Baléares occupées par les musulmans.

Juste en face de la cathédrale un petit hôtel : j’y dépose le sac pour la journée. On se sent tout nu de continuer sans rien sur le dos !

Coimbra est une ville universitaire réputée : sa très ancienne université (1290) est aussi fameuse que la Sorbonne (fondée en 1253) et aussi fréquentée.

L’université

Les étudiants portent encore une traditionnelle cape noire en uniforme. Azulejos très jolis dans l’église.

Je pars ensuite visiter l’école et le jardin botaniques. Magnifique bien qu’ayant beaucoup souffert lors de l’ouragan Leslie en octobre dernier qui a abattu de nombreux vieux arbres. Les azalées étaient en fleur. Belles serres du XIXème. L’aqueduc à côté du jardin est une belle réalisation.

Un vague air du parc d’Anduze avec ses allées de bambous…

La journée n’est pas finie. Visite de la nouvelle cathédrale Sé Nova du XVIème faite par les Jésuites et pour eux jusqu’à leur expulsion du Portugal par le Marquis de Pombal en 1772.

Puis balade dans la vieille ville sur un flanc de colline (des airs du quartier de l’Alfama à Lisbonne) ; il y a beaucoup de chambres d’étudiants… ambiance jeune assurée.

Il me reste encore un peu de temps pour aller découvrir l’église Santa Cruz, son monastère, son cloître : un monument à ne pas manquer.

Bon c’est pas tout, demain il y a un dur chemin et l’hôtel-dortoir ce soir ressemble plus à une auberge de jeunesse qu’à une albergue pèlerine. Jugez un peu.

A 20h00 pas de différence : tout le monde est à la douche (Si, une petite moyenne d’âge divisée par 2).
Par contre à 22h00 dans l’albergue tout le monde dort. Là tout le monde sort ! Je garde le dortoir.

Rendez-vous le 16 avril pour la saison 6, épisode 16-17-18.

2 thoughts on “Marche…ou brève n°5

  1. C’est quand même mouvementé, ce chemin… quel plaisir Coimbra, effectivement cité universitaire célèbre (voir les idem côté espagnol, Salamanca et Alcala de Henarès). Pour les petites faims en chemin, quoi.. ? des biscuits en fome de coquille ? ou des raisins secs…Quels sont les baies sur les azuleros où figure le St Jacques ?
    Bravo pour le roulé-boulé…Ce soir Notre-dame de Paris a brulé
    Bises et courage, tu vois de belles choses !

  2. Tu dois être en excellente forme pour rallonger ton chemin. Ne le fais pas tous les jours quand même. Bon courage pour la suite. A dans trois jours.

    Dany … et Marie-Paule

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